2018, Water is Life, Afrique du Sud
Découvrant par hasard le cortège de cette manifestation, j'ai décidé de le suivre. Les manifestants viennent des townships pour réclamer un accès à l'eau potable. Cape Town a redouté le "Day Zero" en 2017, maintenant, vous pensez que la crise est finie, parce que vous n'en subissez plus les conséquences, déclare une manifestante lorsque la foule s'immobilise devant la mairie. Mais pour nous, la crise avait commencé avant, et elle continue tous les jours, parce que nous n'avons toujours pas d'eau potable, ajoute-elle. Sous un soleil ardent, les revendications sont égrenées comme une longue litanie sans fin. Cela fait des années que cela dure. Comment voulez-vous que l'on vive sans eau potable ? Quelle dignité pouvons-nous avoir sans cela ? Des petits sachets transparents sont lancés à la foule par les organisateurs. Il n'y en a pas beaucoup, mais ils scintillent comme des diamants sortis du ventre de l'Afrique australe. On les déchire avec les dents, et le précieux liquide rafraîchit ces bouches qui n'en finissent pas de quémander un peu plus de justice, tout simplement pour vivre ou survivre. Lorsque arrive enfin le représentant municipal, il ne s'attarde pas en vaine parole. Il ne fera aucune promesse, à quoi bon ? Il sait qu'il ne pourra pas les tenir. A peine a-t-il pris connaissance des doléances qui lui sont remises que le voilà déjà parti. La foule se dissipe lentement, comme un nuage orageux dont la force s'amenuise après avoir grondé un peu.